Série Hacks Interviews n°2: Souriez, vous êtes hackés

Marie-Emmanuelle Aubert travaille pour un opérateur public de la santé. Ex consultante chez l’un des principaux cabinets mondiaux, elle tient le sens de sa mission en haute estime. Son crédo : améliorer les conditions de travail et la performance de ses clients, quitte à hacker gentiment, et surtout discrètement, le système. Explications.

Etape 1 : l’observation

« Au début, j’appliquais les méthodes classiques d’accompagnement du changement » raconte Marie-Emmanuelle. Puis viennent les premières insatisfactions : elle constate que certaines choses ne fonctionnent pas aussi bien qu’elles le devraient, se remet en cause, et surtout cherche des solutions pour améliorer le système. « Plus que les dysfonctionnements, c’est l’impossibilité de les corriger qui m’est apparue frustrante. J’avais alors deux options : laisser tomber, ou trouver un moyen détourné pour agir ». Inutile de préciser quelle solution Marie-Emmanuelle choisi. Une fois sa décision prise, encore lui faut-il une stratégie… « En analysant bien les éléments qui généraient ma déception, j’ai compris qu’ils avaient souvent une cause amont commune : les projets de transformations que nous proposions aux établissements de santé étaient menés par d’excellents spécialistes du domaine concerné (organisation des soin, achats, financement, logistique…), mais nous avions besoin de travailler sur notre posture face au changement, afin d’embarquer les professionnels avec qui nous travaillions et trouver chez eux les ‘pépites’, les solutions qui seraient idéales pour leur transformation » témoigne Marie-Emmanuelle. Il lui faut donc changer les méthodes (un peu) et la culture (beaucoup).

Etape 2 : le hack

« L’approche frontale était exclue. L’organisation était globalement perçue comme efficace et pertinente. J’ai donc choisi une voie en douceur, et par le flanc » s’amuse Marie-Emmanuelle, qui lance alors une série d’ateliers de découverte « Cultivez votre capacité de transformation », dont les titres très opérationnels (parlant d’outils et de méthodes) masquent la séance de coaching que vont vivre ses collègues : « L’idée était de leur faire ressentir ce que nos partenaires vivaient lors d’un changement. Et leur faire découvrir de nouvelles postures, ou encore des méthodes « softs » comme le « co-développement », la psychologie du changement et l’apport des neurosciences… Mes collègues m’ont fait confiance et ont accepté de ne pas tout comprendre tout de suite, puis… de se transformer eux-mêmes ! ». Il faut dire qu’une fois dans la salle, trop tard pour partir ! Le talent et les compétences de Marie-Emmanuelle font le reste. Nos experts découvrent de nouvelles façons de travailler, y adhérent et deviennent eux-mêmes vecteurs du changement en le diffusant dans leurs équipes et projets.

Etape 3 : la révélation du hack

Et pourquoi le révéler d’ailleurs ? « Là encore, j’ai joué un peu avec le système. Avec plusieurs dizaines de réunions au sein d’une équipe de 100 personnes, l’opération n’était pas passée inaperçue. Je devais donc produire un bilan chiffré. J’ai présenté les statistiques et les apports méthodologiques, mais ai laissé le soin à des participants aux ateliers de témoigner de l’impact sur leur posture et leur nouvelle façon d’appréhender les projets » révèle Marie-Emmanuelle avant d’ajouter : « En réalité, j’ai ‘juste’ planté une graine et veillé à ce qu’elle bénéficie de bonnes conditions pour pousser. Je ne me sens pas propriétaire du hack : Il est le fruit d’un long travail de collaborations et d’alliances avec ceux qui ont joué le jeu ».

Etape 4 : et après ?

La nouvelle organisation tient compte des changements profonds initiés par le projet, désormais incarné par ses collègues : un département de la transformation et une équipe de gestion de projets et intelligence collective ont été créés. Marie-Emmanuelle peut reprendre le cours de ses activités. Continuera-t-elle le Corporate Hacking ? « Oui mais uniquement s’il le faut. Tout est juste dans un Corporate Hacking car il n’émerge que s’il correspond à un besoin du système ! ».


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